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Gabidoche, le doyen des garde-champêtres de France

THÉOPHILE OMNÈS

 

Baptisé par ses proches Gabidoche (comprenne qui peut) dans ce terroir des surnoms les plus incongrus, mon arrière grand-père paternel, Théophile OMNÈS est né à Kertanguy, à Saint Pabu, le 6 septembre 1851 dans une petite maison, ornée à l’entrée de l’étoile du Nord.

Inculqua-t-on à ce seul garçon d’une fratrie de 5 enfants le sens des responsabilités et de la protection qui fera sa popularité ?

Âgé de 27 ans, il épouse une fille de la terre, Yvonne GUILLIMIN, de Kerouent à St Pabu, et tous deux s’installent dans la demeure familiale. Si la bonne étoile y donne le jour à 7 enfants, la camarde sévit dans les campagnes, enlève sa compagne, puis deux de ses fils succombent de la tuberculose qui a fait tant de ravages dans la population.

Dans les divers métiers qu’il exerce, on retrouve l’amoureux de la mer. Deux ans sur le remorqueur « Souffleur » et six mois comme apprenti canonnier sur la « Bretagne » élargissent son horizon.

Mais il a trop goûté le sel des embruns, le ressac de la vague sur la coque, la mer au corps lui manque et il redevient pêcheur. C’est lors d’une virée en mer, dans les jours qui suivent le naufrage du paquebot anglais le « Drummond-Castle », en 1896, qu’il repêche la dépouille d’une jeune fille en tenue de soirée. Sans hésitation aucune, il la transporte chez lui, la veille comme si elle était son propre enfant, l’inhume en costume du village et recherche sa famille. Pour ce geste de bienveillance, il reçoit de la Reine Victoria une médaille d’Honneur.

Les rives de l’Aber Benoît, les dunes de Korn ar gazel, les terres qui les environnent lui sont chères. Là tous se connaissent et se côtoient : cette grande famille sera la sienne. Il veut s’en occuper, la protéger. La fonction de garde champêtre, acquise en 1879, le lui permettra pendant une période de 56 ans, jusqu’à sa mort en 1936. Il est nommé, en 1933, doyen des gardes champêtres de France.

Entre la récolte du varech, ses ravaudages de filets, notre garde champêtre en casquette et sabots de bois, s’en va à travers le pays battre le tambour pour attirer l’attention et informer la population ou encore pour coller des affiches.

A la sortie de la messe, petits et grands se regroupent près du muretin du cimetière, puis attendent que se hisse sur la pierre consacrée à cet usage leur garde champêtre. Alors, foin des lunettes, il donne lecture des avis de ventes, réunions ou décisions officielles de toutes sortes. Une photo le montre ainsi juché, prêchant la bonne parole aux adolescents.

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Théophile OMNES, portant la plaque du garde-champêtre sur le bras gauche.

Vif et alerte, il parcourt les chemins creux et boueux, les dunes, les grèves, peu soucieux des frimas, réservant à chacun le mot qui fait plaisir. Il n’intervient que par devoir, mais avec une autorité plus paternelle que répressive. Il est aimé et, durant son si long mandat, ne verbalise que très rarement : 16 fois des gens de l’extérieur et 10 fois des gens de la commune pour des coupes de goémon non réglementaires.

Qu’il tombe sur quelque pochard égaré, il le ramène à son domicile. Il n’y a pas de violon à Saint Pabu.

Cet homme modeste fait pourtant figure de notable dans les cérémonies officielles. Il rayonne et a fière allure, l’épée sur le côté et la plaque étincelante de la République au bras gauche. Il en a des médailles, ce vieil enfant du pays : celles des Services Municipaux, des Ministères de la Marine, de la Justice, du Gouvernement Britannique. 

Dans cette vie active, loisirs et culture trouvent aussi leur place. Théophile confectionne avec adresse des objets d’art en bois, passion transmise à nombre de ses descendants. Ses divers talents rendent de nombreux services : il répare voiles et toitures, calfate les bateaux, ensevelit parfois les morts, apprend leurs premiers mots de français aux futurs écoliers... L’hiver, à la tombée de la nuit, ses sabots claquent sur la terre gelée. Il est en route pour animer, chez les uns ou les autres, les veillées au coin du feu où il n’a pas son pareil pour tenir en haleine son auditoire et raconter, de mémoire et dans sa langue maternelle si riche, les contes de son pays natal, le Léon.

Aujourd’hui encore, celles et ceux qui ont croisé son chemin se souviennent avec respect et tendresse de ce personnage haut en couleur, à qui sa nombreuse descendance ne cesse de tresser des lauriers…

Giselle Omnès

Voir aussi l'article suivant sur son fils et successeur...



29/03/2014
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